samedi 29 septembre 2018

"Mélik, un peintre surréaliste en Provence", Diaporama, Salle Armand Lunel, La Méjanes

Je remercie l'association des Amis de la Méjanes d'avoir accepté une conférence sur Edgar Mélik dans la grande salle Armand Lunel.


"La Provence et le surréalisme" est une page d'histoire de notre région dans la mesure où André Breton, Victor Brauner, Marcel Duchamp, Max Ernst, Consuelo de Saint Exupéry, etc. ont vécu ou fréquenté  plusieurs mois la villa Air Bel à Marseille (octobre 1940 à mars 1941), avant de gagner les Etats-Unis.
Une grande exposition a commémoré cette présence des surréalistes en Provence en 1986,  
La planète affolée. Surréalisme, dispersion et influences, 1938-1947


En 1985, l'éditeur André Dimanche, avait publié un magnifique album dû à Bernard Noël, "Une liaison surréaliste MARSEILLE-NEW-YORk"


Dans le cas de Mélik (1904-1976), la rencontre avec le surréalisme a d'abord été littéraire. A Paris, Mélik étudie l'anglais et allemand à la Sorbonne. Il fréquente la librairie d'Adrienne Monnier, rue de l'Odéon, où se retrouvaient les jeunes pré-surréalistes André Breton et Louis Aragon. Mélik lit les Champs magnétiques publiés en 1920, les Manifestes du surréalisme (1924 et 1930). Il se plonge dans la lecture des Chants de Maldoror,  de Lautréamont (pseudonyme), et les Poésies I et II d'Isidore Ducasse (publiées pour la première fois par André Breton, dans sa revue Littérature, 1920).
Il ne quitte Paris qu'en 1932, et revient tous les ans passer plusieurs mois dans son atelier rue Daguerre (les pièces qu'il louera dans le vieux château de Cabriès sont glaciales en hiver).
Après la guerre et la dispersion des surréalistes certains imaginent que le surréalisme est passé de mode. Ce n'est pas le sentiment de Mélik qui reste marqué par sa jeunesse. Après sa démobilisation en juin 1940, il est à Paris. Il reçoit Claude Marine,  journaliste de la revue Comoedia. Il déclare, "je côtoie le surréalisme mais je reste nietzschéen."
Tout de suite après la guerre, il brûle une partie de ses livres, mais sauve le recueil de poèmes Feu de joie, de Louis Aragon, parce qu'il en retient un seul vers : "Le monde à bas, Je le bâtis plus beau" (Secousse, poème où Aragon évoque l'expérience des tranchées et le déluge des bombes et de terre sur lui, le laissant pour mort).

 En 1950 a lieu une grande exposition Mélik à Marseille, galerie Da Silva, 67 rue Saint-Ferréol. Il l'intitule "Ponts coupés" et écrit un texte surréaliste qui célèbre sa peinture, son opposition au système marchand de l'art qu'incarne à Paris la rue La Boétie, et qui se termine par la prière au Bouddha (la sérénité malgré tout).
Mais c'est surtout sur le plan spirituel et plastique que Mélik accepte la rupture surréaliste, mettant fin au modèle extérieur (la peinture comme paraphrase esthétique du monde) pour inventer une fusion entre la réalité et le rêve, entre la perception et la représentation.  Mélik pratiquera une sorte d'automatisme qui laisse la surface de la toile suggérer peu à peu une image où les masses de couleurs et le trait vivant laissent émerger un nouveau monde. Il sera passé du "combat pour l'interprétation" au "combat pour la création" (1969). On peut rapprocher sa démarche du "mur de Léonard", d'après le conseil du peintre de la Renaissance qui suggéra à ses élèves de regarder un vieux mur sali pour que chacun, selon sa propre vision, voit émerger des formes, des paysages, des batailles, que son talent n'aura plus qu'à achever. André Breton commente ce texte en 1933 ("le message automatique") et en 1937 (dans l'Amour fou) pour en faire une résolution du passage de l'objectivité à la subjectivité.

Mélik est sans doute le seul peintre formé à Paris, d'inspiration surréaliste, qui a déployé toute son oeuvre en Provence, dans le vieux château de Cabriès, qui est aujourd'hui le musée Edgar Mélik, avec ses fresques et la chapelle ornée de ses visions (le déluge, l'enfer et le paradis du peintre).

                                                                               O. ARNAUD

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire